dimanche 26 juin 2016

CINEMA DE MINUIT - ETE PRECODE !!

Bonjour les amis !

Ce soir, à 00 H 25 sur F3 : Au Seuil de l'Enfer (1930), d'Archie Mayo...

 Oh, merci, merci, cher CDM, en programmant ce cycle consacré à la Warner, et en n'y incluant que des films tournés dans la première partie des années 30, tu me combles ! Nous tombons en effet dans la fameuse période pre-code, celle qui anticipe sur la reprise en main morale du cinéma américain à partir de 1934. Nous sommes à l'aube du cinéma parlant, et le cinéma hollywoodien va chercher ses sujets auprès du théâtre new-yorkais , un théâtre dessalé, qui se veut réaliste, c'est-à-dire souvent dur, violent et sexy. Mais dans cette époque très adulte du cinéma américain, un studio va se distinguer particulièrement : celui des Frères Warner . Sous l'influence de Jack W. , mais aussi du jeune directeur de production Darryl F.Zanuck, futur ponte de la Fox, le studio va délibérément tourner le dos à la magie , à l'irréel, au glamour,  et produire des films inspirés par les gros titres des journaux . Et qui fait alors les gros titres des journaux ?  Les Gangsters . Rendus riches et puissants par l'idiote Prohibition, ils sont plus célèbres que certains acteurs.
Le film de ce soir est une des premières productions du genre, une des premières productions de Zanuck également. Il s'agit du récit de la grandeur et de la décadence d'un chef de gang , qui, tombé amoureux , veut tout lâcher, mais se retrouve rattrapé par son passé. Film rapide (moins d'une heure vingt !), succession incessante  d'évènements, dénouement sombre : tout le dispositif Warner Gangster Movie est là, mais encore balbutiant : pourquoi ?
Pas tant à cause du metteur en scène maison Archie Mayo, au style  impersonnel , certes , mais assez respectueux de la consigne du studio pour rendre l'ensemble diablement  efficace, mais surtout à cause d'une distribution inappropriée.


Lew Ayres fut un des talents les plus prometteurs du début du parlant. En 1930, il est une véritable star, grâce au triomphe d'A l'Ouest , Rien de Nouveau, de Lewis Milestone...



Mais Lew Ayres était  un esprit indépendant, libéral, pour ne pas dire progressiste. Surtout, il voulait  choisir ses films et rester libre, loin des studios. Ce qui n'était alors, pas du tout à la mode. Et qui l'empêchera de rester longtemps au sommet.
De plus, pour son seul film Warner, il est mal distribué : lui, le doux, le sage, est distribué dans le rôle d'un dur. Un dur repenti, certes, mais un dur quand même. Il aurait pu faire illusion, si , pour compléter la distribution, le studio n'avait pas fait appel à une de ses nouvelles recrues, qui était, lui, un dur de dur : James Cagney .


C'est son deuxième film pour le studio. Dans le premier, il incarnait un marin, et avait déjà surpris tout le monde par son énergie. Ici, dans le rôle du bras droit du héros, ambitieux et cruel, il trouve son emploi, celui qui le fera entrer dans la légende : celui du gangster, du vrai. Il mange le film, et Lew Ayres fait bien pâle figure. Quelques mois plus tard, Cagney tournera L'Ennemi Public numéro 1, et deviendra une des plus grandes stars du studio et de l'époque...

Malgré ses défauts, le film est considéré comme la matrice de bien des films à venir, et particulièrement de Scarface, tourné en 1932 par Howard Hawks. On y trouve en particulier le gimmick de la pièce de monnaie agitée par un bad guy, et que George Raft reprendra à son compte...


Une réjouissante curiosité !

Extrait du film, avec Cagney : 


A plus !

Fred.


samedi 18 juin 2016

CINEMA DE MINUIT - LE FILM A LA TELE...

Bonjour les amis !

Dimanche prochain, à 00 H 25, sur F3 : Théorème (1968), de Pier Paolo Pasolini...


Théorème, c'est d'abord l'histoire d'un scandale. Un scandale comme seul pouvait en provoquer un cinéaste à la fois marxiste et catholique.
Un visiteur, jeune et beau, s'installe pour quelques temps au sein d'une famille bourgeoise milanaise. Tranquillement et successivement, il va séduire, au sens propre, tout le monde c'est à dire coucher avec chacun des membres de la famille et apparentés. Mâles inclus. Puis il repart, et le foyer explose : la bonne fait des miracles, la mère se donne à tous, le frère devient artiste, etc...
Ce beau garçon (Terence Stamp), c'est à la fois la mort de la bourgeoisie... et le Christ. Eh oui.
Et curieusement , cette parabole va énormément séduire le jury de l'Office Catholique, qui va donner au film... son Grand Prix !
Le Vatican faillit s'en étouffer dans ses hosties ! L'esclandre déchira les milieux chrétiens, à tel point que l'Office Catholique reniera son propre jury, six mois plus tard.
Le film fut également saisi , en Italie, et poursuivi pour obscénité. Pasolini défendra chèrement son film, le défendant pour ce qu'il est, à savoir un film symbolique. Le tribunal le suivra, affirmant : "Comme il s'agit incontestablement d'une oeuvre d'art, elle ne peut pas être obscéne ."
Les actuels contempteurs de La Vie d'Adèle pourraient en prendre de la graine.

Ceci dit, Théorème, c'est aussi l'histoire d'une époque . A partir de 68, les cinéastes, souvent contraints auparavant de jouer avec la censure, décident de se laisser porter par le grand vent de liberté qui souffle alors. D'où des films plus directs, plus crus, plus... théoriques aussi. Le film porte bien son nom : le film expose le théorème d'un éventuel retour du Christ, et du bouleversement qu'il provoquerait. Le dispositif , pour innovant qu'il fut à l'époque, reste un dispositif, très linéaire, et , au bout du compte, assez prévisible.

Tout cela pour dire, que, pour moi, en tous cas, le film a vieilli, comme nombre de films reposant trop sur une volonté de transgression. Il manque d'émotion, les personnages sont des figures, certes bien campées ( Silvana Mangano, Massimo Girotti, et le futur auteur Anne Wiazemsky), mais restent des figures symboliques. Survolant le film de son extraordinaire beauté, Stamp parvient quand même à nous faire ressentir l'attirance folle que l'on peut éprouver pour ce garçon.

Pasolini avait fait plus fort, plus sobre... Il fera plus fort ensuite, et ô combien plus violent et dérangeant ( Salo !) . Aujourd'hui, le film étonne surtout par son sérieux, à la limite de l'emphase.

Mais... Mais peut-être ne suis-je pas objectif. Peut-être ai-je trop été influencé par l'extraordinaire sketch que Bedos a consacré au film , sketch d'autant plus génial que tous les détails inhérents au film sont rigoureusement exacts. 


 Depuis, je ne peux plus voir le film de la même façon. Alors, un conseil, pour apprécier pleinement le film, ne cliquez pas sur le lien ci-dessous.

BEDOS : LE FILM A LA TELE

Bande annonce (en anglais) :



A plus !

Fred.




vendredi 10 juin 2016

CINEMA DE MINUIT - ON LÂCHE RIEN !

Bonjour les amis !

Dimanche, à 00 H 20, sur F3 : Les Camarades (1963), de Mario Monicelli...

 Mais, mais ? Mais que se passe-t-il ? Après les cheminots, les éboueurs , les inondations, le CDM voudrait-il lui aussi gâcher la grande fête neuneu de l'Euro 2016 en programmant ce brulot politique  ?
I Compagni est en effet la preuve rare qu'un film engagé peut être une grande réussite. On chercherait en vain dans le Cinéma Français une fresque aussi juste, aussi forte... et aussi lucide.
L'action se passe à Turin, au début du XXème Siècle : les ouvriers d'une usine de tissage se mettent en grève pour protester contre leurs conditions de travail . Un intellectuel socialiste (Marcello Mastroianni) les encourage et les assiste. La lutte sera âpre, accompagnée de désillusions, de morts, et se terminera , au bout d'un mois, par une implacable répression .
La force du film est de ne laisser aucune dimension de côté. Le récit englobe aussi bien la destinée collective que les parcours individuels. Tour à tour émouvant et drôle, il remporte aussi l'exploit d'éviter le didactisme militant, l'intellectuel paraissant, in fine, aussi fragile et faillible que ses autres camarades.
Le soin apporté aux décors et aux images, dues à l'immense Giuseppe Rotunno, complice habituel de Visconti, contribue incontestablement à la prestance de l'ensemble. 
Enfin, Monicelli réunit une des distributions les plus prestigieuses de l'époque : en plus de Masrtoianni, les Camarades sont incarnés par Renato Salvatori, Folco Lulli, François Périer, Bernard Blier , et Annie Girardot . Cette distribution franco-italienne n'est absolument pas dérangeante , chaque personnage étant formidablement construit et écrit par le duo Age-Scarpelli, passés maîtres dans l'art de la Comédie Italienne.
Si le film reçut un formidable accueil critique, il fut un désastre commercial, contrairement au film précédent de Monicelli, La Grande Guerre...


Monicelli analysait cet échec comme un malentendu  : le public crut que l'on voulait lui vendre un film soviétique alors que l'auteur voulait juste "montrer pourquoi dans certaines conditions une grève ne peut pas ne pas naître". Avec un peu d'amertume, le réalisateur remarquait également que, tourné cinq ou six ans plus tard, le film aurait sans doute été un triomphe .

A ne pas manquer !

Extrait : 


A plus !

Fred.